Comment vivre le sentiment de « rejet » par son enfant de 24mois/2ans?

Comment vivre le sentiment de « rejet » par son enfant de 24mois/2ans?

Comment vivre le sentiment de « rejet » par son enfant de 24mois/2ans?

L’enfant construit tout un maillage relationnel avec son environnement humain depuis la grossesse où les liens sont d’abord sensoriels, puis un fois né au gré des rencontres répétées. On parle de constellation familiale. Imaginez une sorte de système solaire , au centre il y a bébé tel un soleil, puis sur des cercles concentriques des satellites plus ou moins proches qui sont les personnes composant de façon plus ou moins proches l’environnement affectif de l’enfant. On trouve parfois sur le même cercle parfois sur un cercle un peu plus éloigné, le père, ou co-parent qui est le premier « autre » à entrer dans sa vie et sur qui il va s’appuyer. Il n’y a pas de préférence mais des stratégies d’apaisement plus ou moins efficace selon les situations et les périodes de la vie de l’enfant avec les différentes personnes de cette constellation. Cette constellation de personnes constituant l’environnement affectif de l’enfant va s’étayer tout au long de sa vie. Les relations amoureuses entreront également dans cette constellation.

En première ligne, dans le prolongement de la grossesse, on trouve la mère. Pour des raisons avant tout biologiques,  le bébé a besoin plus souvent de cette proximité. L’attachement ne vaut pas amour mais lien. Si le nourrisson n’a pas encore compris qu’il n’est plus dans le ventre maternel, et encore moins que sa mère n’est pas lui, il va cependant percevoir rapidement cet autre qu’est le père (ou co-parent) comme un « non-soi » avec qui il va se lier.

Vers 18mois, l’enfant poursuit son perfectionnement de la compréhension du monde qui l’entoure.  La motricité est en pleine explosion, permettant à l’enfant d’expérimenter qu’il a des compétences et un impact sur son environnement, et pas uniquement sur des objets ( attraper, lancer, porter, vider etc.) matériels mais aussi sur les humains. Mue par un sentiment de toute-puissance , il va laisser libre cours à son expression en s’opposant allègrement à tout.  Il va alors expérimenter, au cœur de ses interactions, son impact. « quand je prends cet objet des mains de l’autre il pleure » « quand je tire les cheveux il pleure » « quand je refuse de faire quelque chose l’autre réagit »…. L’enfant est d’abord surpris de cette réaction qu’il va finir par déduire comme en lien avec son action. C’est en répétant l’action qu’il va intégrer qu’il suscite ces réactions. L’enfant se construit dans la répétition d’une même expérience avec des variations .

C’est au cours de cette étape de son développement que l’enfant peut parfois vous donner l’impression qu’il « rejette » une personne. Un enfant n’est pas un adulte miniature, il raisonne et fonctionne différemment. L’émotion et le sensoriel sont au premier plan . 

vignette: Elias , 24 mois, est en pleine affirmation de soi. Il expérimente les limites matérielles et éducatives. Il a acquis la fonction du « non » et l’utilise à volonté toujours un peu surpris de ce que cela suscite chez l’adulte. Ce soir c’est exceptionnellement son père qui vient le chercher à la crèche, Elias est décontenancé. Il s’attendait à voir sa mère. En voyant son père il s’effondre, il se jette au sol en criant « noooon MaMaaaaan ». La frustration est une déflagration dans tout le corps à chaque détonation : l’enfant expérimente que la réalité ne correspond pas à ce qu’il avait anticipé, c’est un vrai drame. Et il ne peut pas encore comprendre pourquoi il ressent cela. Ce ne sont que les interventions répétées des adultes lui verbalisant sur la base de la « #règle du trépied[1] »  qu’il va parvenir progressivement à supporter ces émotions qui le font déborder. Elias est donc frustré et déçu de ne pas voir arriver sa mère ET NON FRUSTRE DE VOIR ARRIVER SON PÈRE. Du côté de ce père, qui a pris des heures pour venir faire la surprise à son fils c’est la douche froide. Il est « déçu », mais comme le père est un adulte à peu près bien construit, il est triste mais cette frustration ne l’envahi pas au point de se désorganiser. Mais Elias perçoit que son père a une réaction émotionnelle qu’il ne comprend pas, il ne voit pas de lien de cause à effet ( normal pour son âge). Cette incompréhension va mobiliser chez Elias un besoin de vérifier cette expérience en variant le contexte et tenter de comprendre. Ainsi  autour du repas, autour du coucher, autour du bain Elias va dit « non Maman » quand son père se présentera. Chaque opposition de l’enfant va un peu plus attaquer son père qui va se mettre à douter sur l’amour de son fils, parfois même penser qu’il ne sait pas y faire. C’est donc sur une réaction inattendue que l’enfant va réitéré son comportement d’opposition.

 ELIAS AIME SON PÈRE, IL PROCÈDE A UNE EXPÉRIENCE DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE QUI VISE A MIEUX COMPRENDRE LES RÉACTIONS ET INTERACTIONS HUMAINES . Il ne comprend pas que lui si petit puisse ébranler un géant comme son père. C’est jouissif et inquiétant, il va donc rejouer l’expérience jusqu’à ce qu’il soit rassuré sur la solidité de son père.

Si le petit garçon lui disait « je t’aime pas », on peut  répondre «  et bien moi je t’aime pour deux ». Ou encore lorsqu’il refuse que son père l’accompagne au coucher  « ce soir c’est à mon tour de te lire une histoire, mais si tu ne veux tu as le droit, je te laisse le livre et je sors, mais ce soir c’est mon tour pas celui de maman » L’enfant a besoin d’expérimenter qu’on ne peut pas choisir entre ses parents, c’est un choix trop anxiogène. Et cela passe par la notion de limite, une limite qui ne punit pas mais qui protège physiquement et psychiquement.   Le cadre éducatif basé sur le roulement dénué de dimension affective ( c’est pas par envie mais par organisation pragmatique que le cadre doit s’établir assurant une équité des interventions des parents) permettra à l’enfant de ne pas avoir la responsabilité de choisir. A son âge le choix n’en est pas un. Il sera l’œuvre d’une toute-puissance.

Plus tard dans l’instauration du complexe d’œdipe dans sa forme classique[2], l’enfant va entrer en rivalité avec le parent du sexe opposé pour garder pour lui seul l’attention de la mère. Mais là encore cela ne signifie pas que l’enfant rejette ou ne veuille plus de son autre parent. Chez l’enfant (comme chez l’adulte finalement) le refus n’empêche pas l’amour.

[1]     Voir instagram post @johanna.psychologue

[2]     Schéma qui peut varier notamment dans un couple homoparental ou monoparental.

Johanna FrancommePsychologue clinicienne spécialisée en périnatalité et petite enfance.

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